Chemin d’exploitation - QPC

A l’occasion d’un litige relatif à l’existence d’un chemin d’exploitation les auteurs d’un pourvoi en cassation ont demandé, par mémoire spécial et distinct, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

" L'article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime, tel qu'interprété par la Cour de cassation, en tant qu'il permet d'appliquer le régime du chemin d'exploitation à des chemins faisant l'objet d'une propriété privée, est-il :
- contraire au droit de propriété, consacré aux articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789 ?
- entaché d'incompétence négative au regard des dispositions l'article 34 de la Constitution, de sorte qu'il porte atteinte au droit de propriété consacré aux articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789, faute de préciser les conditions et les garanties entourant la qualification de chemin d'exploitation ?
- contraire au principe d'égalité devant les charges publiques, garanti par l'article 13 de la Déclaration de 1789, faute de prévoir une réparation du préjudice résultant de la charge spéciale et exorbitante supportée par le propriétaire concerné ? "

La Cour de cassation rejette en ces termes :

« Attendu que la disposition contestée est applicable au litige ;

Qu'elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu que la question ne présente pas un caractère sérieux, dès lors, d'une part, que, n'ayant ni pour objet ni pour effet de priver les propriétaires d'un chemin d'exploitation de leur droit de propriété, mais seulement d'en restreindre l'exercice, l'article L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime, tel qu'interprété par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, tend à permettre exclusivement la communication entre les fonds traversés et leur exploitation et à assurer des relations de bon voisinage par l'édiction de règles réciproques relatives à leur usage, réservé aux intéressés, et à leur entretien, proportionnées à cet objectif d'intérêt général, d'autre part, qu'il énonce une présomption simple de propriété au bénéfice des propriétaires riverains, chacun en droit soi, et est complété par les articles L. 162-2 et suivants du même code, qui fixent les conditions d'usage, d'entretien et de suppression de ces chemins par l'ensemble de leurs propriétaires et attribuent au juge judiciaire la connaissance des contestations les concernant, de sorte que le législateur, qui a déterminé les principes fondamentaux du régime de la propriété des chemins d'exploitation, n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence et qu'il n'en résulte pas de rupture de l'égalité devant les charges publiques » (Civ. 3°, 14 janvier 2016, n° 15-20286, Obs. D. Lochouarn, RDR 2016-31)

Jean Debeaurain